La perception de la beauté d’un visage est une notion objective influencée par des critères biologiques et évolutionnistes, et subjective en raison de facteurs culturels, sociaux et émotionnels. Avec l’influence des médias et réseaux sociaux, nous vivons dans une société qui accorde une importance grandissante à la beauté et à la jeunesse. Nous avons même vu apparaître la notion de « lookism » qui est une propension à la ségrégation sociale et professionnelle sur la base de critères de beauté. Il existe même des applications de rencontre qui renforcent leurs critères de sélection basés sur l’apparence physique.
Cela peut entraîner une pression sociale et un mal-être chez certaines personnes dont les critères physiques ne correspondent pas aux standards de beauté. Ceci explique en partie l’essor spectaculaire de la médecine et de la chirurgie esthétique, qui permettent, à travers des actes plus ou moins invasifs, de prévenir le vieillissement et/ou d’améliorer l’apparence des patients.
Le médecin ou le chirurgien esthétique joue donc un rôle clé dans l’équilibre psychologique de ses patients. Il devra faire preuve d’écoute empathique et de discernement afin de répondre aux aspirations de ses patients, l’objectif étant de les guider vers des procédures esthétiques qui répondent à des attentes réalistes en évitant les excès.
Cet article a pour objectif d’expliquer les différents critères objectifs de l’analyse d’un visage, processus essentiel préalable à tout traitement d’embellissement ou de rajeunissement.
Qu’est-ce qu’un visage harmonieux ?
Analyse de face
Il existe de nombreux critères anatomiques qui déterminent l’harmonie d’un visage. Lorsqu’on analyse un visage de face, on évalue ses proportions horizontales, régies par la règle des trois tiers, selon laquelle chaque tiers doit avoir une hauteur identique :
- Le tiers supérieur, qui s’étend du trichion (point médian cutané situé à la limite inférieure du cuir chevelu) jusqu’à la glabelle.
- Le tiers moyen, qui va de la glabelle au point sous-nasal.
- Le tiers inférieur, qui s’étend du point sous-nasal au menton. Ce dernier tiers est lui-même divisé en deux parties : le tiers supérieur, qui va du point sous-nasal au stomion (point de contact entre la lèvre supérieure et la lèvre inférieure) ; le tiers inférieur restant, qui s’étend du stomion au point menton.
Cette analyse permet d’identifier un excès ou une insuffisance de hauteur au niveau des trois étages du visage. (1)
L’analyse des lignes horizontales permet, quant à elle, d’évaluer le parallélisme du visage.
- La ligne bi-ophryaque, relie deux points situés au milieu de la ligne sus-orbitaire.
- La ligne bi-pupillaire.
- La ligne bi-commissurale.
Ces trois lignes doivent être parallèles pour garantir un équilibre esthétique. Il convient de rechercher une obliquité ou une déviation lorsque l’on envisage une réhabilitation esthétique.
Une irrégularité de la ligne bi-ophryaque peut traduire un déséquilibre de la hauteur des sourcils, souvent lié à l’hypertonicité d’une partie du muscle frontal.
Un décalage de la ligne bi-pupillaire peut indiquer une asymétrie des orbites.
Une ligne bi-commissurale inclinée peut être liée à une asymétrie structurelle ou à un affaissement causé par le vieillissement.
Lors de l’analyse faciale, on étudie également la largeur du visage, qui est divisée en cinq parties égales. La largeur de la base du nez est équivalente à celle d’un œil et à la distance intercanthale interne. En situation normale, les ailes du nez s’alignent avec les canthi internes et les commissures labiales sont alignées avec les pupilles. Cette analyse permet de détecter une éventuelle asymétrie faciale.
Les traits symétriques sont universellement perçus comme agréables de manière innée, car ce critère traduit un bon développement in utero, supposément corrélé à une bonne santé et à une meilleure résistance immunitaire. De ce fait, cette harmonie des traits est inconsciemment attrayante, car elle serait bénéfique pour l’adaptation et la reproduction de l’espèce.
En réalité, aucun visage, même le plus parfait, n’est strictement symétrique. Dès la conception, les parties gauche et droite d’un fœtus se développent indépendamment l’une de l’autre, en respectant plus ou moins cette notion de symétrie. Ce développement se poursuit après la naissance, influençant à la fois l’apparence physique et la personnalité de chaque individu.
Le photographe australien Julien Wolkenstein a exploré la symétrie faciale dans sa série « Symmetrical Portraits », où il a photographié des individus et créé des portraits symétriques par manipulation numérique.
Voici le cas d’une jeune fille de 18 ans ayant remporté, en 2008, un concours de beauté fondé sur les proportions et la quasi-parfaite symétrie de son visage (estimée à 95%). Voici pourtant le résultat obtenu en appliquant le filtre Wolkenstein.
On constate que ses deux hémifaces ne sont pas strictement symétriques et que le portrait non retouché du milieu est le plus attrayant.
Il en est de même pour Angelina Jolie et Brad Pitt, reconnus comme de véritables icônes de beauté. Dans les deux cas, on constate que les portraits non retouchés du milieu sont plus attrayants.
Il faut donc rassurer nos patients en leur expliquant que cette particularité physiologique est universelle et qu’elle est même à l’origine du charme d’un visage. Les asymétries discrètes sont donc la clé de la beauté du visage ; il convient par conséquent de les préserver, voire de les valoriser dans nos plans de traitement.
Un visage asymétrique ne doit être traité que s’il entraîne des problèmes fonctionnels ou esthétiques majeurs susceptibles de provoquer de réelles difficultés psychosociales.