En médecine esthétique, les procédures de comblement des rides du visage sont de plus en plus pratiquées. L’acide hyaluronique demeure le produit le plus utilisé à l’heure actuelle. Il bénéficie d’une réputation d’innocuité et de sécurité mais certaines complications peuvent être sévères, notamment les complications vasculaires qui peuvent entraîner des nécroses cutanées, voire une cécité. Ces complications s’expliquent par un phénomène d’embolisation du réseau artériel lors de l’injection d’un produit en intravasculaire, ou par un phénomène de compression et de vasospasme des artères lors d’une injection d’acide hyaluronique.
Les localisations les plus à risque sont le nez, la glabelle, la zone péri orbitaire, le sillon nasogénien et la lèvre, avec un risque d’occlusion des branches de l’artère faciale, telles que la branche nasale, ophtalmique ou rétinienne.
En cas d’occlusion vasculaire survenant après un traitement d’injection de comblement, les recommandations évoquées dans cet article peuvent aider à l’évaluation, au diagnostic et à la gestion de la situation. Le but ultime est la prévention de la nécrose tissulaire.
Prérequis obligatoire
Une bonne connaissance de l’anatomie vasculaire 3D par le médecin injecteur, afin de limiter le risque de complications vasculaires. Nous proposons une approche globale en 5 points :
- Avant toute injection d’acide hyaluronique, le médecin injecteur doit évaluer les facteurs généraux et locaux à risque de complications vasculaires, en fonction de la zone.
- La rhéologie du produit et la technique d’injection doivent être sciemment choisies en fonction de la zone cutanée. Le clinicien doit s’efforcer de minimiser les risques en adoptant une technique d’injection plus sûre, en possédant une connaissance approfondie de l’anatomie faciale tridimensionnelle.
- Le médecin injecteur doit diagnostiquer rapidement une complication vasculaire lors d’une injection d’acide hyaluronique en fonction du tableau clinique, qui peut être franc et sans équivoque, ou partiel et évoluant pendant les 48 premières heures.
- En urgence ou le plus rapidement possible (dans les 6 heures de façon optimale), le médecin suit un protocole systématisé de prise en charge des complications vasculaires qui a été élaboré par différents consensus d’experts. L’accident vasculaire doit être déclaré auprès d’un organisme de vigilance.
- La prise en charge des complications vasculaires doit être globale et prolongée. Le médecin ou chirurgien esthétique doit prendre en charge les complications infectieuses et cicatricielles de l’ischémie vasculaire et effectuer des soins locaux de cicatrisation et/ou une correction chirurgicale à distance.
Facteurs favorisants les complications vasculaires post-injection d’acide hyaluronique
Au recueil des antécédents du patients, il faut prendre en compte le terrain vasculaire du patient, l’état cutané du site d’injection, et évaluer la potentielle « dangerosité » du site à injecter.
Facteurs généraux
L’état antérieur du patient peut constituer une fragilité vasculaire sous-jacente. Les patients présentant des pathologies générales de type vasculaire, comme les vascularites, ou consommant des médicaments vasoconstricteurs (ex : pseudoéphédrine), ou encore ayant une pathologie anémique ou dyspnéique (diminution de l’oxygénation globale), sont à identifier lors de la première consultation. La prise des antécédents du patient est nécessaire car certaines pathologies peuvent être un obstacle à la récupération après un accident vasculaire post injection d’acide hyaluronique.
Facteurs locaux
L’état local de la zone cutanée à injecter doit être analysé. Les zones cutanées peuvent être le siège de traumatismes anciens (cicatrice, séquelles de brûlure ou de laser) ou encore d’une chirurgie récente, pouvant être responsables de remaniements locaux. Les injections d’acide hyaluronique post-rhinoplastie sont plus à risque, notamment dans les 12 premiers mois, en raison des remaniements inflammatoires, des adhérences (risque de compression à l’injection) ou des modifications de structures anatomiques (artères, cartilages, et calibre fins et anastomotiques du réseau vasculaire de la pointe nasale).
Les variations anatomiques, soit par dédoublement d’artère ou de branche anastomotique supplémentaire, soit par variation de positionnement des artères, constituent un réel risque de complications vasculaires post injection. Ces variations sont constitutionnelles ou acquises. Elles ne peuvent pas être diagnostiquées de façon systématique avant toute injection. De nouveaux appareils portatifs d’échographie avec échodoppler sont en voie de développement. Leur objectif est d’établir une cartographie vasculaire du visage du patient en temps réel et de guider le geste précis d’injection. Dans le futur, cet appareil pourrait être une aide supplémentaire.